forme une rosace, déploie sa grande fleur de lotus sur la céramique
noire, et je pense : « Voilà ma chance. Voilà une technique. »
Un genre de chirurgie pour poisson aura finalement
décidé du modus operandi. Et me voilà, une paume
sur la page ; la main non experte qui s’apprête.
Il faut, disent-ils, « découper le poisson encore vivant ».
Ça tombe bien, car en cet instant je suis encore vivant.
Même si personne, en dehors de moi, dans mes plis
ne m’a jamais véritablement goûté. Quelque chose. Une peur.
Cette poche de je ne sais quoi qui brûle ce qu’elle touche.
Donc j’essaie d’apprendre cet art de la séparation
dès le viscère du poison de la nacre des chairs.
(Oui, c’est bien ma propre nature que j’ai reconnue dans le fugu.)
Je me prépare. Je tranche. Dans le vif et le moins vif,
et le mort. Je taille. Suis les instructions. D’autres
ont pour eux la biographie du saumon qui de retour
après un long et saumâtre voyage d’instinct comme unique instant
meurt d’avoir engendré au lieu qui l’a vu naître. Mais moi non.
Moi j’ai cette page faite sur un métier de bouche. Journal vieux, linceul
où se jettent l’abat, l’humeur d’un poisson venimeux.