C’est ici que Marie-Antoinette
a troqué sa vie contre une autre,
là sur cette île du Rhin, dans une cabane
battue par la pluie qu’elle s’est dénudée,
rejetant comme une mue
ses vêtements et langage anciens.
Elle en est ressortie autre, et à Strasbourg
le soleil avait remplacé la pluie.
Ne suis-je pas venu ici pour ça ?
Aujourd’hui j’ai grimpé une vis
vertigineuse de trois-cent-trente marches
pour à bout de souffle
d’une terrasse de cathédrale
dominer la brume — et tenter
de différencier l’est du nord, du sud
et de l’ouest ; débusquer une frontière.
Mais c’est déjà le soir et trois
étages au-dessous de mon lit, à la nuit,
par-dessus le silence les ouvriers
grattent, aspergent d’eau, d’asphalte
la rue, font une route neuve.
« Ils raclent ma vie, me décrassent.
Ils me fabriquent un chemin » souriai-je
avant de sombrer dans mes rêves.
