L’eau, le ciel, s'il n'y avait pas le vent
on ne saurait qui est qui. Déjà à peine
voit-on ce que chaque grain fait par à-coups
à l'eau du port. Les rafales courent sur
elle comme de grandes ombres d’aile,
qui sous la surface coupent, séparent
comme une lame aujourd’hui et la mémoire.
Il y a un an ce deux-mâts sombrait.
Un an et puis quoi ? Dans l’air, juste
deux mâts. Mais sous l’eau, même noyé
le bateau rêve, rêve un rêve qu’on voit :
les murmurations des étourneaux au-dessus
des mâts calmes redéploient ses routes,
regonflent ses voiles auriques. Il pleut
et la pluie est au noyé encore le beau temps.
