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There was a boy
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DANS LES PARAGES :

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USA, L'ŒIL DE LA CAMERA 29

les gouttes de pluie tombent une à une du châtaignier aux branches étendues par-dessus la tonnelle et jusque sur la table dans le café en plein air et sur le gravier boueux et sur mon crâne tondu dont mes doigts tâtent et caressent doucement les bosses et les trous
printemps et nous venons de nager dans la Marne Au loin au-delà de ce gros nuage à l’horizon on martelle un toit de tôle sous la pluie au printemps après avoir nagé dans la Marne avec ce martellement qui vient au Nord pour enfoncer l’idée de mort dans nos oreilles
lancinante l’idée de la mort pénètre dans le sang qui coule au printemps sous les cous halés par le soleil elle navre le ventre sous le ceinturon serré elle se précipite comme du cognac jusqu’à l’extrémité de mes orteils et de mes doigts qui tâtent les cheveux ras sur mon crâne hésitants timides les doigts palpent pour apprécier la résistance du crâne immortel sous la peau une tête de mort un squelette portant des lunettes sont assis sous la tonnelle où tombent de temps à autre des gouttes de pluie il est vêtu d’un uniforme kaki neuf et vit dans mon corps de vingt et un ans qui nageait peu avant dans la Marne en caleçon à rayures rouges et blanches à Châlons au printemps

John Dos Passos

MELANCHOLY BREAKFAST

Melancholy breakfast
blue overhead blue underneath

the silent egg thinks
and the toaster's electrical
ear waits

the stars are in
"that cloud is hid"

the elements of disbelief are
very strong in the morning

Frank O'Hara

CHARDON ARGENTÉ

S'en tenir
à la terre

Ne pas jeter d’ombre
sur d’autres

Être dans l’ombre des autres
une clarté

Reiner Kunze


THE RED WHEELBARROW

so much depends
upon

a red wheel
barrow

glazed with rain
water

beside the white
chickens.

William Carlos Williams

NON PAS MA SOLITUDE, MAIS LA NÔTRE

La plupart des hommes me ressemblent trop, mes dehors dépouillés, fèces, poils, peau, vêtements au rebut, plus bons à rien, morts. De l’unicité, que peut-on dire que nous n’avons pas déjà dit ? Rien à leur dire, rien à dire. De la façon qu’ils m’apparaissent, je dois apparaître à leurs yeux. La solitude de l’être humain est l’unicité sans fin de l’homme. L’homme est un ; l’homme est seul au monde. Nous sommes l’un, même nous qui chuchotons serrés les uns contre les autres, comme si nous étions deux, comme font les enfants, qui en savent autant que nous, et font semblant, tout en y croyant, qu’il y a là-bas un autre.

William Bronk

FUGUE DE MORT

Lait noir de l'aube nous le buvons le soir / le buvons à midi et le matin nous le buvons la nuit / nous buvons et buvons / nous creusons dans le ciel une tombe où l'on n'est pas serré / Un homme habite la maison il joue avec les serpents il écrit / il écrit quand il va faire noir en Allemagne Margarete tes cheveux d'or / écrit ces mots s'avance sur le seuil et les étoiles tressaillent il siffle ses grands chiens / il siffle il fait sortir ses juifs et creuser dans la terre une tombe / il nous commande allons jouez pour qu'on danse / Lait noir de l'aube nous te buvons la nuit / te buvons le matin puis à midi nous te buvons le soir / nous buvons et buvons / Un homme habite la maison il joue avec les serpents il écrit / il écrit quand il va faire noir en Allemagne Margarete tes cheveux d'or / Tes cheveux cendre Sulamith nous creusons dans le ciel une tombe où l'on n'est pas serré / Il crie enfoncez plus vos bêches dans la terre vous autres et vous chantez jouez / il attrape le fer à sa ceinture il le brandit ses yeux sont bleus / enfoncez plus les bêches vous autres et vous jouez encore pour qu'on danse / Lait noir de l'aube nous te buvons la nuit / te buvons à midi et le matin nous te buvons le soir / nous buvons et buvons / un homme habite la maison Margarete tes cheveux d'or / tes cheveux cendre Sulamith il joue avec les serpents / Il crie jouez plus douce la mort la mort est un maître d'Allemagne / il crie plus sombres les archets et votre fumée montera vers le ciel / vous aurez une tombe alors dans les nuages où l'on n'est pas serré / Lait noir de l'aube nous te buvons la nuit / te buvons à midi la mort est un maître d'Allemagne / nous te buvons le soir et le matin nous buvons et buvons / la mort est un maître d'Allemagne son oeil est bleu / il t'atteint d'une balle de plomb il ne te manque pas / un homme habite la maison Margarete tes cheveux d'or / il lance ses grands chiens sur nous il nous offre une tombe dans le ciel / il joue les serpents et rêve la mort est un maître d'Allemagne / tes cheveux d'or Margarete / tes cheveux cendre Sulamith

Paul Celan


BAISERS

Un baiser
abrège la vie humaine de 3 minutes,
affirme le Département de Psychologie
de Western State College,
Gunnison (Col).
Le baiser
provoque de telles palpitations
que le cœur travaille en 4 secondes
plus qu’en 3 minutes.
Les statistiques prouvent
que 480 baisers
raccourcissent la vie d’un jour,
que 2360 baisers
vous privent d’une semaine
et que 148 071 baisers,
c’est tout simplement une année de perdue.

Paul Morand


TE DEUM

Ce ne sont des victoires
que je chante,
je n'en ai pas,
mais le soleil qui brille pour tous,
la brise,
les largesses du printemps.
Non la victoire,
mais le travail quotidien accompli
du mieux que je pouvais :
non un siège sur l'estrade,
mais à la table commune.

Charles Reznikoff

VISITE AU MOINE DE LA MONTAGNE

Sous le sapin,
j'interroge le garçon :
« Où est le maître ?
— A l'aube il est parti
cueillir des simples.
Par là, en bas
de cette montagne.
Une brume épaisse est venue,
il a disparu,
je ne sais pas où. »

Jia Dao

CAUSA

J'ajuste ces mots pour quatre personnes,
Quelques autres les entendront peut-être,
Ô monde, je suis navré pour toi :
Tu ne connais pas ces quatre personnes.

Ezra Pound

FRAGMENTS D'UN JOURNAL D'ENFER (EXTRAIT)

Le temps peut passer et les convulsions sociales du monde ravager les pensées des hommes, je suis sauf de toute pensée qui trempe dans les phénomènes. Qu'on me laisse à mes nuages éteints, à mon immortelle impuissance, à mes déraisonnables espoirs. Mais qu'on sache bien que je n'abdique aucune de mes erreurs. Si j'ai mal jugé, c'est la faute à ma chair, mais ces lumières que mon esprit laisse filtrer d'heure en heure, c'est ma chair dont le sang se recouvre d'éclairs.

Antonin Artaud


POÈME 1546

On ne sait jamais qu'on part — quand on part —
On plaisante, on ferme la porte
Le Destin qui suit derrière nous la verouille
Et jamais plus on n'aborde.

Emily Dickinson

MORAINES (EXTRAIT)

Ce qui, dans cette débâcle d'eaux et de glaces, résiste au déferlement unanime, et à la confusion élémentaire, résiste, surnage, se met en travers du courant, contredit l'ordre diluvien et, au terme d'une lutte opiniâtre, obtient de son refus et de sa crédulité, de prendre corps et signification, d'être là, d'être présent, encombrant, éclairé, comme un enfant, comme une hutte de planches et de joncs, comme un fagot de paroles noué et jeté au hasard, et que le froid de quelqu'un, très loin de là, oriente, redresse, allume...

Jacques Dupin

DESTINÉE

Tournés à la tâche
comme n'importe quelle
fibre créée
pourquoi nous plaindre ?

Guiseppe Ungaretti

UN RÉCIT, 11

Fleuve de notre substance
S'écoulant
Avec le reste. Fleuve de la substance
De la courbe terrestre, fleuve de la substance
Du lever du soleil, fleuve de limon, d'érosion, s'écoulant
Vers une inimaginable mer. Mais l'esprit se lève

Dans le bonheur, se lève

Au milieu de ce qui est. Je ne connais pas d'autre bonheur
Ni n'en ai été témoin... Les îles
Vers le nord

Dans le brouillard polaire
Et la mer peu profonde —
Rien d'autre

Sinon la sensation
De l'endroit où nous sommes

Nous qui sommes le plus au nord. La merveille de la vague
Même ici c'est l'écho de son bouillonnement
Dans le monde ; je songeais que même s'il n'y avait rien

La possibilité d'être existerait ;
Je songeais que j'avais rencontré

La permanence ; la pensée nous assaillait dans cette mer
Car nous y respirons l'évident
Miracle

Du lieu, et parlons
Si nous devons sauver
L'amour au Monde d'En Haut

Éclairé par la glace un langage substantiel
De clarté, et de respect.

George Oppen

CONSEILS

Il faut savoir attendre,
attends le flux de la marée,
— comme une barque
sur le rivage —,
sans que le départ t'inquiète.
Quiconque attend
sait que la victoire est à lui ;
car la vie est longue et l'art est un jouet.
Et si la vie est courte
et si la mer n'arrive à ta galère
attends sans partir et espère toujours,
car l'art est long et, d'ailleurs,
c'est sans importance.

Antonio Machado

SANS TITRE, XXI, 686

« Ne me laisse pas seul », dit mon esprit à mon esprit —
Lis ; défends-moi contre moi-même — fais un raisonnement, un calcul qui t'occupe — —
Défends-moi contre le désordre et le pire que j'engendre —
contre le vrai — — La vérité est toujours terrible. La certitude est inexorable. Ne regarde pas par la fenêtre qui donne sur la nuit.

Paul Valéry

QUE SOMMES-NOUS ?

Que sommes-nous ? Navires qui passent l'un près de l'autre dans la nuit,
Chacun avec la vie sur les lignes des vigies éclairées
Et chacun sachant de l'autre seulement qu'il y a là de la vie et c'est tout.
Navires qui s'éloignent pointillés de lumière dans les ténèbres,
Chacun indécis et diminuant de chaque côté du noir.
Le reste est la nuit muette et le froid qui monte de la mer.

Fernando Pessoa

PEINTURE

toutes les choses ont un air d'attente, aussitôt qu'on les voit. est-ce à la ressemblance avérée que nous les saurons, en même temps que nous, ici.

elle-même, c'est la réalité
— autre, et qui ne ressemble à rien, que nous désirons. déjà, dans l'embrasure, elle fleurit. dans le halo d'une floraison au ras, qui perce à travers toute apparence. presque sans émoi.

le carreau. les pampres de la façade. dans les branchages, le bris du ciel. ainsi se fêle, et fleurit, la fatigue, la fraîcheur du monde reçu.

il arrive que, parvenus à cette chose même que nous avons désirée, elle se perde dans une différence infinie. nulle illusion si la croisée renvoyant la couleur de sa lumière au bleu qu'on ne voit pas, est pour jamais confondue avec lui. qui, alors, dira le nom des choses reconnues ? déjà, dans cette attente, elles ont fleuri.

André du Bouchet


POÈMES DE SAMUEL WOOD (EXTRAIT)

Faible et faiblissant toujours davantage
Il ne mène plus à son gré l'offensive
Faute de foi en une glorieuse issue
Seule la fureur désormais l'aiguillonne
Qui le fait frapper d'une main tremblante
Chaque coup suivi de pas en arrière
Mais sans baisser la garde ni perdre souffle
Tenant bon et se tenant pour battu
Il refuse la mort inscrite sur son front
Peut-être chantera-t-il victoire en tombant.

Louis-René des Forêts
huchel

FERME THOMASSET

Au-dessus de la paille et du purin
La lumière suintante de la lanterne.
A l’anneau du mur,
Cimentés par la lune,
Le rude harnais des bœufs,
La baguette de pin rouge,
Le cuir au vireton meurtrier.

L’heure trouble,
Encore avant la traite de cinq heures –
La fleur desséchée du foin
Frôle
La tristesse des larges fronts.

Ouvre la porte.
L’odeur de l’étable se mêle
A l’odeur lactée des étoiles.

Sur les montagnes
Le silence,
Foulé par les pieds de l’aube.
Et sur les pierres,
Ecrasée,
L’hostie blanche des fleurs de pommiers.

Peter Huchel

larkin

PEAU

Docile tenue quotidienne,
Tu ne pourras pas toujours garder
Cette jeune et intrucable surface.
Tu devras apprendre ton texte –
Colère, divertissement, sommeil;
Ces quelques signes menaçants

Du vent grossier et permanent,
Tout chargé de sable, le temps;
Tu devras t’épaissir, te relâcher
En un vieux sac
Portant un nom souillé.
Parchemine-toi alors; sois rugueuse; affaisse-toi;

Et pardonne-moi de
N’avoir pu trouver, quand tu étais neuve,
De fête bruyante
Où t’afficher, comme
Y ont droit les vêtements
Jusqu’à ce que la mode change.

Philip Larkin

Sara

IL VIENDRA DES PLUIES DOUCES

Il viendra des pluies douces et l'odeur de la terre,
Et des cercles d'hirondelles stridulant dans le ciel,

Des grenouilles aux mares qui chanteront la nuit
Et des pruniers sauvages palpitant de blancheur;

Les rouges-gorges enflant leur plumage de feu
Siffleront à loisir perchés sur les clôtures.

Et nul ne saura rien de la guerre qui fait rage
Nul ne s'inquiètera quand en viendra la fin.

Nul ne se souciera qu'il soit arbre ou oiseau
De voir exterminé jusqu'au dernier des hommes

Et le printemps lui-même en s'éveillant à l'aube
Ne soupçonnera pas notre éternelle absence.

Sara Teasdale

Porchia

VOIX (EXTRAITS)

Tu me regardes comme si tu me disais : je ne te donne rien. Et tu te désoles, parce que je te regarde comme si je te disais : je ne veux rien.

*

Nous voyons des hommes et des hommes et des hommes presque tout le temps, et quelquefois seulement nous voyons un homme.

*

Tu me donnes tout ce que tu peux, mais sans rien de ce que tu ne peux pas. Tu me donnes un corps sans âme.

*

Parfois, tout m'abandonne, et pour que tout me revienne, il faut que moi je m'en aille.

Antonio Porchia

Simone

ATTENTE DE DIEU (EXTRAIT)

La beauté du monde est l'orifice du labyrinthe. L'imprudent qui, étant entré, fait quelques pas, est après quelque temps hors d'état de retrouver l'orifice. Epuisé, sans rien à manger, ni à boire, dans les ténèbres, séparé de ses proches, de tout ce qu'il aime, de tout ce qu'il connaît, il marche sans rien savoir, sans espérance, incapable même de se rendre compte s'il marche vraiment ou s'il tourne sur place. Mais ce malheur n'est rien auprès du danger qui le menace. Car s'il ne perd pas courage, s'il continue à marcher, il est tout à fait sûr qu'il arrivera finalement au centre du labyrinthe. Et là, Dieu l'attend pour le manger. Plus tard il ressortira, mais changé, devenu autre, ayant été mangé et digeré par Dieu. Il se tiendra alors près de l'orifice pour y pousser ceux qui s'approchent.

Simone Weil

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