Petite philosophie lapidaire pour rester dans le jeu


Résister le plus longtemps possible est le seul but apparent. Assez vite pourtant, répéter la même action contre le sort, ou plutôt, soyons précis : une suite de sorts, te semble un gaspillage de ta force. Il n’en est rien. Tu la dépenses contre un plein de vie. Ainsi à force de résister, tu engranges la chance. Ta chance. C’est-à-dire le matériau capital de ton existence. Dis-toi tout d’abord qu’il y a deux sorts à part, que tu n’éviteras pas car ils sont tes extrémités ; deux portions d’une seule et même substance qui scindée génère ton essor. Le premier c’est tout simplement celui qui te fait exister. A partir de ce premier sort particulier, inévitable, invisible et extrême, tu te retrouves à tenter chaque instant d’éviter tous ceux qui sont évitables, peu ou prou visibles et non extrêmes, et ce jusqu’à cet autre particulier, inévitable, invisible et extrême : celui qui te détruira. Il est le jumeau de celui qui t’a fait apparaître. Il va reprendre ce qui te fut donné. De ta résilience et ta lutte contre tous les sorts évitables dépendra l’expansion de ta localité entre tes deux extrêmes. Il existe deux types de sorts évitables et non extrêmes et qui flottent dans un espace que nous nous partageons. Le sort commun : il vogue et s’il nous rencontre, c’est par les circonstances. Il peut être le hasard. Le sort commun est bien représenté en l’espèce d’un astéroïde dérivant. Et puis le sort accéléré : lui nous est adressé. Il n’est pas passif, accidentel. Il est volontaire, agressif. Exterminateur. Il est rare mais souvent fatal, car en lui se cache souvent ta seconde extrême. Il peut être ta malédiction, le fatum, etc. Le sort accéléré est lui parfaitement représenté par les images de la foudre et du vaisseau armé. Si le sort commun semble naturel, le sort accéléré lui semble habité. Comme les sorts accélérés ne se contentent pas de se ruer vers toi, qu’ils te convoitent, visent à te détruire instantanément, tu dois avant tout en finir avec eux. Mais que tu ne sois pas non plus obnubilé par eux au point de ne plus penser aux sorts communs. Le sort commun est fait des même éléments que toi, sauf que toi tu es plus organisé et constitué de moins d’éléments. Le sort accéléré aussi est fait des mêmes éléments que toi, et lui aussi est organisé, et comme toi il possède une direction. Il te faudra réduire tous ces sorts avant de les détruire. Les réduire signifie les fragmenter par des premiers contacts. Parfois un sort commun te semblera un sort accéléré par l’effet que tu lui auras donné en le fragmentant. Chaque sort atteint se fragmente et chacun de ses fragments peut revenir te frapper à cause du mouvement que ta frappe aura imprimé à ses éclats. Un sort seulement touché une fois se fragmente aussitôt. Chacun de ses éléments devient un sort réduit qui à son tour se fragmente s’il est touché. Pour détruire ces sorts il te faudra patience, acuité, persévérance et adresse. Il pourra arriver que tu détruises le sort en même temps que toi-même. Un sort fragmenté devient plus dangereux ; plus petit il est plus mobile. La vitesse que tu imprimes aux fragments du sort que tu détruis peut te les rendre fatals. Un seul éclat du sort que tu détruis parfois te détruira. D’une autre manière, à l’instant de sa destruction tu peux te servir du sort que tu détruis comme d’une arme. Il arrive que tu échappes au sort à l’instant même où il allait te frapper. C’est aussi parfois le sort le plus près de toi, le plus à même de te détruire qui est le plus facile à détruire. Le sort accéléré peut être détruit, quand ils se rencontrent, par le sort commun. Le hasard n’est donc pas, contrairement au fatum, adressé. Les circonstances où tu apparais déterminent évidemment tes chances face aux sorts. Tu peux préférer lutter contre le sort de la place où tu te trouves, car en te déplaçant autour de lui un autre pourra te frapper que tu n’auras préalablement pas vu, ou tu te jetteras contre lui sans y penser. Le moins il y a de sorts, le plus il y a de calme autour de toi et en toi, mais ça ne dure jamais qu’un bref instant. Quand tu en as fini avec une série de sorts, tu as le droit à un court répit. Puis une nouvelle série t’est destinée. Garde ton calme dans ta lutte contre le sort. Le mouvement de panique est le signe avant-coureur de ta destruction. Dis-toi que tant que le sort ne t’as pas touché et qu’il te reste le temps et l’espace pour lui faire front, manœuvre doucement vers lui et achève-le. Fais-toi confiance, mais ne te surestime pas ou tu ne ferais pas ce qu’il faut, comme dans la panique tu ferais ce qu’il ne faut pas. Si cela arrive plusieurs fois tu n’auras pas même le temps de souffler, tu seras anéanti à ton tour. Définitivement. Comme tous les sorts que tu auras détruits. Et dis-toi que tu n’es peut-être pas plus fort qu’un seul sort. Dis-toi qu’un seul sort parfois en détruit plusieurs comme toi, comme toi tu en as détruit plusieurs comme lui. En dernier recours tu peux te projeter sur un autre plan, dans l’urgence, tu seras sauvé mais tu pourras aussi bien être détruit si la chance n’est pas avec toi et si tu te projettes sur un point du plan déjà occupé, ou sur le point de l’être, par un sort quel que soit son type. Mais ne te soucie pas trop de tout ça, car qu’importe, tu seras anéanti.

(Observations et conseils à propos d’exister suscités par le shoot’em up Asteroids)